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The Gentle Spring // Looking Back at the World

Dernière mise à jour : il y a 7 jours


©Philippe Dufour
©Philippe Dufour

Cofondateur d’un groupe devenu mythique après sa séparation, signé sur un label qui fait l’objet d’un

culte trente ans après sa cessation d’activité, Michael Hiscock aurait pu, comme d’autres, capitaliser sur une petite gloire indie. Mais ce n’est visiblement pas le genre de la maison. L’aventure Field Mice

terminée, le jeune homme aura préféré « reprendre une activité normale », comme on disait aux Guignols de l’info, même si la musique restera toujours une partie essentielle de son existence. Une installation à Paris mettra encore un peu plus de distance avec Sarah Records et son passé pop anglais. Qu’il n’aura jamais renié, ceci dit, pas plus qu’il n’aura définitivement remisé sa basse. On l’aura ainsi entendue sur les disques de Lightning in a Twilight Hour, projet de son ex-compère des Field Mice, Bobby Wratten. Ou sur scène, quand l’occasion se présentait, comme avec The Apartments pour une mini-tournée française il y a trois ans.

Sous le nom de Michael Hiscock & friends, il avait même, avec l’accord de ses anciens acolytes, donné

dans la précédente décennie quelques concerts où il reprenait des classiques de sa formation des années 88-91. Parmi les « amis » en question, sa compagne Emilie aux claviers. C’est à cette époque que les deux commencent à ébaucher des chansons, sans idée très claire pour la suite. Elles auront donc tourné pendant longtemps dans leur tête avant de trouver leur forme définitive, d’être enregistrées puis publiées : d’abord, sur un 45-tours (Dodge the Rain / Paris Windows) pour la mini-structure française Too Good To Be True en 2023, hors-d’œuvre suivi cette année du plat de résistance : l’album Looking Back at the World chez Skep Wax, label fondé par Rob Pursey et Amelia Fletcher (le groupe Heavenly sur Sarah et autres aventures indie pop), de vieux amis là encore.


©Philippe Dufour
©Philippe Dufour

Superbe cyanotype végétal et élégante typographie en italique qui rappelle celle des premiers disques de The House of Love : la pochette, à l’image du nom du groupe, annonce un univers doux et intimiste. Un coup d’œil au verso laisse toutefois à penser qu’avec des titres comme The Girl Who Ran Away, I Can’t Have You as a Friend ou The Reason Why You Lie, les chansons ne parlent pas que d’arbres et de petits oiseaux. Sans amertume mais avec une certaine mélancolie, elles jettent un regard en arrière (« looking back... »), mesurent le temps qui a passé, sans mièvrerie. Elles parlent de choix de vie, de ce qu’il a fallu laisser derrière soi pour avancer. Expériences personnelles, mais propos universel.

Musicalement, si Michael Hiscock n’a pas cherché à copier le son des Field Mice, on sent qu’il n’est pas non plus allé contre sa pente naturelle, celle de la simplicité, des sonorités acoustiques et d’un certain classicisme qui devrait assurer au disque de vieillir comme un grand cru, à l’instar de ses modèles signés Nick Drake, Prefab Sprout ou The Go-Betweens. Le producteur Ian Catt, qu’il connaît depuis 1988, a su de toute évidence tirer le meilleur des compositions malgré les contraintes de temps et de budget. L’apport de Jérémie Orsel, guitariste aux grandes facultés d’adaptation (on a encore pu s’en rendre compte récemment à la soirée d’adieu du bar Le Motel à la Bellevilloise où, au sein d’un backing band formé pour l’occasion, il reprenait sans peine les morceaux les plus variés), a été tout aussi décisif. Sugartown, le premier morceau, nous accueille par de lents arpèges vaporeux, puis quelques accords discrets de guitare, et enfin la voix de Michael, claire, posée, sans effets. The Gentle Spring, c’est aussi la révélation d’un chanteur qui avait rarement été au premier plan jusqu’ici, surtout sur disque. Et également d’une chanteuse, puisque Emilie le rejoint régulièrement et chante même trois morceaux, dont deux qu’elle a écrits et qui sont peut-être les sommets mélodiques de l’album.

Tout en étant très cohérent et harmonieux du début à la fin, Looking Back at the World offre quelques

contrastes et nuances bienvenus selon les morceaux : une cadence un peu plus prononcée (avec une boîte à rythmes, faute de batteur, et une basse tout en rondeur et en souplesse), des claviers plus présents, un chant un peu plus mordant de la part de Michael (sur Untouched ou le morceau titre)...

Même si les arrangements de cordes ou de trompette joués aux claviers pourront rappeler les enregistrements à l’économie de l’époque Sarah Records, ce premier album de The Gentle Spring – on en espère d’autres – ne s’adresse pas qu’aux nostalgiques. Les concerts qu’on a eu la chance de voir, dans des bars ou de vraies salles, ont d’ailleurs confirmé que la musique du trio était bien vivante, interprétée avec envie et implication. Et si les sets se terminent souvent par une version de Emma’s House des Field Mice, pour le plus grand plaisir des spectateurs, c’est bien une nouvelle page de son histoire musicale que Michael Hiscock tourne ici avec ses deux indispensables complices.


Vincent Arquillière


Looking Back at The World (Skep Wax records / Too Good To Be True) 2025



Retrouvez The Gentle Spring dans le n° de Printemps de Persona, à sortir prochainement.




 
 
 

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