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Rose Mercie // ¿Kieres Agua? (Interview intégrale)

Dernière mise à jour : 10 mai 2023


©Ariane Kiks

LES FLEURS DU BIEN

Par Paskal Larsen


Rose Mercie, groupe parisien qui compose une musique indie-punk lo-fi de traviole fait immédiatement son effet. Leur son DIY fragile, porté par des voix parfois hésitantes est un petit moment de bonheur auditif qui n’a pas de prix. Leur ADN est composé des multi-instrumentistes et chanteuses Charlotte, Michèle, Lou-Anne et Inès. Nos miss ont du talent, de l’originalité, dans l’art de donner de nouvelles vibrations au son after-punk lo-fi. La preuve avec leurs deux albums, dont ¿Kieres Agua? sorti en mai dernier. Il est temps de faire plus amples connaissance avec ces roses punk, symboles de l’amour DIY.


Pouvez-vous en quelques mots nous faire un petit résumé de vos antécédents musicaux avant la formation de Rose Mercie ?

Inès : J’ai fait de la musique classique dans une école très ancienne, avec des profs très libres. Puis au conservatoire municipal, pour des raisons économiques, mais je me suis mal adaptée et j’ai tout quitté vers 16 ans.

Michèle : J’ai commencé la guitare classique quand j’avais 8 ans avec des cours particuliers jusqu’à mes 15 ans mais de façon intermittente, pas d’affilée. Ensuite j’ai arrêté pour de bon et des copines du lycée m’ont invité à l’époque pour faire un groupe avec elles où je jouais de la guitare. On s'appelait Les Dudettes, on a fait trois concerts au total.

Lou-Anne : Aucuns antécédents musicaux pour ma part. J’ai pris quelques cours de guitare électrique quand j’étais ado, mais quand j’ai compris que c’était dur de chanter et jouer en même temps, j’ai laissé tomber.

Charlotte : Je n’ai jamais réussi à apprendre à jouer d’un instrument quand j’étais enfant. Je m’y suis vraiment mise à 17 ans quand je rêvais de jouer dans un groupe de riot girls et mon rêve est devenu réalité en rencontrant deux filles avec qui on a fait le groupe Pussy Patrol. J’avais jamais fait de batterie mais je voulais absolument devenir batteuse, alors je m’entrainais tout le temps sur des boites de pizza. On a joué pendant quelques années du rock bien à fond et pas du tout carré. Après, avec mon frère Alex et mon pote Fifi (qui joue à présent dans le groupe 11ème étage), on a monté un groupe plus expérimental, La Ligne Claire.


Par quel biais vous êtes-vous rencontrés ? Et quel a été le déclic pour former Rose Mercie ?

I : J’ai rencontré Charlotte par le biais de son frère Alexandre, ils avaient un groupe ensemble. Elle a réalisé mon rêve secret en me proposant d'intégrer leur groupe.

M : Je suis venue avec des potes à un concert que Charlotte organisait chez elle à Montreuil. Je commençais mon projet solo Belmont Witch, ça faisait trois ans que je vivais en France. Elle m’a proposé en deux deux, de faire une petite jam un jour où elle ferait la batterie sur mes morceaux et en proposant aussi à la fois de rencontrer un jour les filles pour faire un peu de guitare. On s’est revues une fois elle et moi et ensuite je les ai rejoints pour une répète au Café La Pêche à Montreuil et je ne les ai plus lâchées.

L-A : Inès et moi on allait ensemble à Camondo les mercredis pour dessiner. On est devenues amies. Je suis allé voir son groupe génial La Ligne Claire et j’ai donc rencontré Charlotte. On est devenues amies. Pendant les vacances d’été de l’année 2012, elles m’ont téléphoné pour me dire qu’elles comptaient monter un groupe de rock de meufs et voulaient savoir si je voulais en faire partie. Je ne savais jouer d’aucun instrument et pour moi cette proposition sortait vraiment de nulle part. J’ai accepté avec joie et je me suis retrouvée, du jour au lendemain, à faire de la batterie.


Votre couleur sonore est-elle venue instantanément ?

I : Dès les premières répétitions, j’avais des émotions très fortes. Les chansons étaient très minimales, mais il y avait comme un fil magique qui reliait tout, qui comblait les espaces entre les instruments. Nous avons une façon de jouer très cathartique et le style varie selon nos vies respectives, comme un bateau qui tangue et qui change de direction en fonction du vent.

M : Rien n’est instantané mais il y a beaucoup de temps présent dans la musique qu’on fait. Surtout pendant les répètes, lors de temps de compos et de création, il y a une écoute et une interprétation de ce que l’on chante et ce que l’on joue chacune. Donc oui et non. On joue avec nos moyens, notre matos, mais aussi avec le matos qui est à disposition. Notre son n’est pas fixe, le style ou dynamiques sont marqués, assez bruts et sincères, ou simples.

L-A : Instantanément c’est peut-être un grand mot, mais pour moi oui, notre son s’est imposé rapidement de lui-même. C’est vrai qu’à la base, on avait pour ambition de faire du “rock ”, mais je crois que dès le début Rose Mercie n’a jamais pu/su/voulu porter d’étiquette. Nos influences sont très variées et quand on joue ensemble tout ça se mélange. Il y a aussi notre amitié très forte qui nous permet de nous sentir complètement libres et en confiance dans la musique qu’on fait. Donc forcément ça colore pas mal.


Parlez-nous de votre alchimie sonore. A l'écoute de votre musique, on sent l’instinct, une liberté d’expression innée entre vous. Quelle est votre recette, une bonne bouffe avant la séance de répet ?

I : Oui ! Bravo tu as trouvé ! On se gave de nourriture et nous en parlons beaucoup. Nous sommes amies depuis des années, on s’est vues grandir, changer, se rapprocher, s’éloigner. C’est l'œuvre du temps et de notre détermination à rester ensemble, malgré le doute, ou les changements divers.

M : On a eu la chance de se rencontrer et ensuite ça fait des belles choses. Comme dit Inès, la seule chose qu’on y met c’est de la détermination. Il y a beaucoup d’amour dans ce que l’on fait, aussi bien dans le geste que dans le résultat. Ce que notre musique véhicule, notre existence, l’importance de se donner cette liberté et la partager et surtout aussi, oser croire à nos projets. On sait que notre musique, comme toute les musiques, apporte du bonheur aux gens. Moi j’ai envie qu’elle aille loin dans les quatre coins du monde. L-A : Certes on ADORE la bouffe mais on n’a pas de recette pour autant. Pour filer la métaphore culinaire, je dirais que Rose Mercie c’est un plat succulent qui nécessite 4 ingrédients impératifs à la recette. Chaque membre est irremplaçable.


J’aime votre son fragile, lo-fi, limite brut. Êtes-vous du genre à préférer la première prise, aux heures de répétitions ou bien votre style épuré est justement un travail de longue haleine ?

M : Je dirais plutôt la première option, je nous reconnais dedans en tout cas, par rapport à l’expression de notre jeu. Le travail de longue haleine je le situe plus dans la mise en jeu pour les live, comme une façon de synthétiser ce que l’on crée de façon un peu brut d’abord, qui passe ensuite à une figure plus fixe pour un contexte précis comme l’enregistrement. Ensuite le live c’est comme un mélange de deux. Donc en ce qui concerne la composition je perçois plus souvent un mélange d’improvisation, jets d’idées ou mélodies en automatique. Ensuite il y a l’écoute qu’on fait de ça, chacune de notre côté avec des enregistrements faits sur des portables ou des zoom, puis on revient en répète pour rechercher ou nous rapprocher de ça. Et il y a souvent des nouvelles idées qui viennent. Puis on tranche de façon organique je dirai. I : Nous avons appris à jouer ensemble. Quatre femmes extrêmement différentes qui jouent et qui chantent ensemble, c’est très dense !! Alors pour notre propre santé mentale il a fallu apprendre à débroussailler les morceaux, les rejouer, en parler. Mais ça nous a pris des années pour arriver à cette discipline. L-A : Ces derniers temps, on a quand même bien “bossé ” dans le sens où il s’agissait de défendre les titres de notre nouvel album. “Kieres Agua” a été enregistré en pleine crise sanitaire et donc on n’a pas eu l’occasion de les en jouer en live pendant des mois et des mois. Il a fallu qu’on se réapproprie nos morceaux, qu’on leur fasse “honneur” et depuis un moment on est très contentes de récolter les fruits de notre travail. Maintenant on peut revenir à ce qu’on aime le plus : jammer. C’est de là que tout part à chaque fois. On n’a jamais d’idée préconçue de ce qu’on va faire quand on se retrouve pour jouer.

C : Oui ! Tout naît à chaque fois de ces moments d'improvisation ensemble. Et on sait rapidement quand on a trouvé quelque chose de notable. Pour moi ça se manifeste par tout un ensemble de choses : des frissons, parfois des larmes d'émotion indescriptible en jouant et en regardant les autres jouer, le soulagement aussi de chanter quelque chose qu'on avait sur le cœur. Parfois aussi ça se traduit par un état totalement hilare, celui-là c'est mon préféré, quand on joue depuis des heures et qu'on commence à devenir folles et… avoir faim !


Vous avez formé le groupe en 2013. Malgré son enregistrement en 2015, le premier album n’est sorti qu’en 2018. Pouvez-vous nous raconter les péripéties pour la sortie de votre premier album ? M : C’est des choses qui arrivent il me semble, des questions de plannings, de priorité de sortie dans les calendriers des labels. C’était un premier album et on n'était pas forcément très au courant sur les temps et les relances qu’il fallait faire pour être prioritaires. On n’était pas vraiment décisionnaires sur la question, encore moins pour une co-prod de trois labels, dont un à l’étranger (Monofonus). Je ne me souviens plus comment s’était fait le lien avec lui. L-A : Dans mon souvenir, le souci principal était lié (évidemment) à l’argent. Il a fallu qu’on cherche des co-prod pour que les frais soient répartis entre plusieurs labels et ça, ça a pris du temps. Moi je venais juste de quitter Paris pour m’installer dans les Corbières et beaucoup de labels sont partis du principe (à tort!) que le groupe allait sans doute en rester là… SDZ a été le premier label à vouloir sortir l’album et c’est par son soutien que nous avons pu entrer en contacte et collaborer avec le label américain Monofonus. Finalement, c’est grâce à l’addition du label, encore trop méconnu, JELODANTI RECORDS que le disque a finalement pu voir le jour.


1er LP (2018)


Votre premier album a été enregistré dans le studio du groupe Le Villejuif Underground. Pouvez-vous nous dire quelques mots sur votre lien avec ce groupe, avec Nathan Roche ?

L-A : Charlotte était amie avec Nathan. C’est par son biais que le guitariste et le bassiste ont fait sa rencontre et ont créé le Villejuif Underground. Charlotte faisait d’ailleurs initialement partie du groupe, à l’époque où il y avait une vraie batterie. Moi j’ai fait mes deux dernières années de lycée avec Adam et Thomas, ce sont mes frères. C’était d’ailleurs hyper émouvant symboliquement pour moi d’enregistrer dans leur salon, à la maison-mère. Rose Mercie et le Villejuif Underground ont commencé quasiment en même temps et on est toujours très potes aujourd’hui.

C : On a tout de suite pensé à enregistrer chez eux ! On savait que c'était là qu'on serait le plus à l'aise parce qu'à ce moment-là on avait encore un peu peur d'enregistrer, on ne savait pas trop comment finir nos morceaux. C'était assez génial de pouvoir s'étaler dans le salon et mettre des câbles partout. Ça nous a bien aidés !


L’album a-t-il reçu un bon accueil ? S’est-il bien vendu ? M : Je ne sais plus, mais on a vendu tous nos exemplaires. Monofonus ont distribué aux Etats Unis et on a jamais eu de retour des ventes, du coup ça se trouve il y en a encore plein chez les disquaires là-bas. Faudrait aller vérifier ! L-A : C’est vrai que se n’est pas facile à dire (que ce soit pour le premier ou le deuxième). On est sur des petits tirages (500 pour le premier et 600 pour le deuxième) donc oui ils sont carrément écoulés et c’est super ! On à notre petite « fan-base » d’amour en France en tout cas, ça c’est sûr. Je crois que les belges et les suisses nous aiment bien aussi, pour le reste du monde, ça reste encore à savoir hahaha. C : Au-delà des ventes je dirais aussi qu'on a eu de beaux retours sur le premier album ! C'était fou de lire des choses d'un peu partout dans le monde sur notre musique alors qu'on était si confidentielles. Je me souviens aussi que nos amis qui étaient habitués à nous voir jouer et suer en concert avait été un peu surpris de la sonorité parfois douce et calme de ce premier disque. J'ai l'impression qu'au fil de nos enregistrements on tend à se rapprocher plus de l'énergie live et libre qui se dégage de notre musique. J'espère qu'on fera des albums plus fous encore bientôt !


Dans quel état d’esprit avez-vous abordé l’enregistrement de votre deuxième album Kieres Agua ?

M : L’enregistrement s'est fait à peu près un an après le voyage que nous avons fait au Mexique (NDLR : son pays de naissance) pour nous concentrer sur la composition et création. Certains morceaux ont été entièrement composés là-bas, d’autres existaient déjà et on les a peaufinés. C’était la deuxième fois que nous enregistrions avec Cyril Harrison. Il y avait déjà un rapport de très grande confiance établie avec lui. Je ne pense pas qu’on avait une idée fixe. Le rapport au voyage et aux souvenirs que nous avons gardé était précieux. En quelque sorte c’est ça qui a pu alimenter à sa façon l’histoire, les histoires que nous avions envie de raconter. Pour ma part, ce départ pour ma ville d’origine marquait quelque chose de très important avec une charge émotionnelle, symbolique, très forte et surtout très positive. C’était comme enfin y venir avec mon autre famille. C’était très important de partager ça avec les filles, de vivre ce moment ensemble. L-A : La grande différence entre le premier et le deuxième enregistrement, c’est que ce dernier s’est fait en studio et pas dans un salon en prise live. Personnellement c’est quelque chose que j’appréhendais un peu, puisque pour une fois, on avait la possibilité d’être moins dans l’instantanéité et de ce que ça a de décomplexant. Là on a pu faire des ajouts, des retouches, corriger certaines erreurs, bref j'avais bêtement un peu peur qu’on perde le charme de la fragilité. Au final je crois que c’est une des plus belles expériences que j’ai jamais faite ! C’était épuisant et ultra addictif en même temps. On a enregistré sur 3 jours et une fois que c’était terminé je me sentais complètement perdue, tout ce que je voulais c’était retourner au studio et enregistrer un triple LP.


©Michèle Santoyo


Sur votre page Bandcamp, vous indiquez que l’image d’une femme s’est dessinée au fil des chansons. Pouvez-vous nous éclairer sur ce qui semble être un concept album pour ¿Kieres Agua? ?

M : Nous n’avons pas imaginé l’album en amont. La mise en mots sur cette femme, cette image, est le résultat pour raconter une histoire. Qu’est-ce qu’on dit par rapport à nos compositions ? Du moment où une personne, une entité, groupe fait la réflexion pour rendre accessible au plus grand nombre quelque chose et surtout une création musicale ça vient d’une nécessité de traduire, de rendre cet ensemble d’idées - qui prennent origine dans le groupe et dans l’individuel aussi - en une seule chose. Il y a des thématiques présentes reliés à des lieux, à des passages, à des changements. Il y a aussi des morceaux que nous n’avons pas inclus qui parlent de femmes qui cherchent quelque chose ou quelqu’un ou bien elles-mêmes. Sans oublier que nous sommes aussi quatre femmes dans la trentaine qui évoluent et qui se cherchent chaque jour et qui jouent ensemble depuis 10 ans.

L-A : Oui, comme dit Michèle, il ne s’agit pas d’un concept album. C’est une image qui s’est là encore imposée d’elle-même, et qui n’avait pas été pensée en amont. Lorsqu’on compose, on ne cherche pas à aborder des thèmes nécessairement universels, on exprime des choses très personnelles qui pourraient paraître complexes dans leur singularité mais qui sont en fait très simples. Une fois sélectionnés et mis dans l’ordre, on a senti une cohésion des morceaux vraiment forte. Une espèce de fil conducteur dans les paroles, comme une histoire. C : Dans les chansons qui ont vu le jour à travers la composition de ¿Kieres Agua? et de par son lien étroit avec le voyage et notre amitié profonde, il y a selon moi quelque chose d'ambivalent entre force et mélancolie, solitude et accompagnement sororal. Personnellement, Rose Mercie m'a permis de traverser tellement de moments émotionnels. La musique et l'amitié profonde ont vraiment ce truc magique de pouvoir éradiquer la solitude et le sentiment d'incompréhension ! Et la femme seule du disque ne l'est pas vraiment, elle est très bien entourée de ses amies.


Vos textes sont écrits en trois langues, français, anglais et espagnol. A quel moment sentez-vous que tel texte/sujet sera dans telle langue ?

M : Pour ma part je dirai que ça dépend du contexte d’écriture surtout et à qui on s’adresse. Par exemple, Les Pierres je l’ai écrite à Portel des Corbières, là où Lou-Anne a vécu ses dernières années avant de retourner à Paris. Je pensais à l’amitié avec les filles, à l’amour, à la nature qui nous entourait, au fait de percevoir un bonheur accompli et le besoin d’en être reconnaissante. Sur Regresar, lors de l’écriture je pensais à ma grand-mère. Mais il y a aussi des morceaux ou les paroles viennent de façon très orale, donc sans d’écriture au début. Les paroles peuvent venir d’un chant qui s’invite tout seul. Pouvoir savoir pourquoi elles viennent en une langue plutôt qu’une autre, c’est de l’ordre de… l’amusement ?

C : Oui c'est vrai qu'on se laisse porter et on découvre presque à la fin d'une impro dans quelle langue chacune à chanter, et quels mots elle a dit ! En attendant on s'amuse beaucoup avec ça et des mondes symboliques se créent en patchworks de langues comme dans nos morceaux Sweet place ou Dinosaur.


C’est Mikey Young (mieux connu sous le nom d’Eddy Current) qui a mastérisé vos deux albums. Comment l’avez-vous rencontré et pourquoi l’avoir choisi ?

L-A : Ils ont été fait à distance et chaque fois ont étaient hyper contentes de travailler avec lui. La pomme ne tombe jamais loin de l’arbre, si je ne me trompe pas, on a été mis en contact avec lui par le biais de Nathan Roche. Il a travaillé avec pas mal de groupes qu’on aime et il nous a tout de suite fait sentir que notre musique lui plaisait vraiment donc on était en confiance. C’est Cyril Harrison qui a fait le mixage des deux albums. Pour le deuxième, on a eu la chance de pouvoir venir au studio et participer en direct sans le rendre tout à fait fou

C : Oui merci Cyril ! On vous recommande l'écoute de ses derniers enregistrements d’ Éric Chenaux notamment, c'est trop beau. Enfin pour ce qui est de Mikey Young, c'est Nico SDZ qui nous l'a recommandé et depuis on veut tout faire avec lui. C'est un génie du mastering, plein de chaleur et de simplicité. C'est un super musicien aussi !


Votre morceau Les Glycines est également sur la compilation Cartelle Vol.1. label porté par Liza du duo A Trois Sur La Plage. Cette compilation ne contient que des morceaux avec des chanteuses ou groupes féminin. Est-ce important pour vous d’être un groupe féminin dans le rock indé et êtes-vous féministes ?

M : Tout est important et tout est futile. Ça dépendra de ce que notre musique laissera comme trace. On aimerait que notre groupe soit reconnu pour ce qu’il crée dans les différents espaces, scènes, milieux qu’il touche actuellement et qu’il pourrait être amené à toucher. Donc, si quand on joue devant des petites filles ou jeunes femmes on les inspire pour se mettre à faire de la musique comme on nous a déjà dit après des concerts, alors oui c’est important. Quand on est programmées pour notre musique et non pas pour remplir un quota féminin, on reste aussi tout simplement un groupe.

L-A : On est féministes oui. Et par conséquent on souhaite évidemment être reconnues pour notre musique et pas pour le simple fait d’être des femmes. Après, les femmes sont encore mises en avant de façon tellement tristement minoritaires, qu’on est toujours très heureuses de participer en tant que groupe de femmes à des compilations ou des plateaux féminins. En juin, on a fait une tournée avec VV Leather et Fiesta en el Vacio, deux projets solos de femmes et je ne vous cache pas que c’était délicieux, voire assez cathartique.

C : C'est aussi bien agréable de bosser avec des ingées son ! On aimerait beaucoup trouver une personne qui nous suive en tournée et qui connaîtrait bien notre musique et sa complexité sonore.


Tournage du clip de Sweet Place ©Ella Hermë

En concert, vous tenez chacune tous les rôles en faisant la chaise tournante des instruments et chants. Êtes-vous multi instrumentistes depuis le début ?

M : En faisant partie de Rose Mercie il n'y a pas d’excuses. Je veux dire, tu rassembles quatre meufs qui font des morceaux ensemble, tu les laisses ensemble 10 ans, normal qu’elles aient envie de tout faire. T’as une batterie devant toi ou un synthé, il n’y a pas de limites, tout le monde peut y aller. Pourquoi je n’essaierai pas de faire un peu de synthé ou un peu de batterie ? Si on avait des sax à portés de main et du temps devant nous ce serait pareil. Ce sont des instruments, c’est fait pour les utiliser et faire des sons, puis des rythmiques et des mélodies avec. On n’est pas des multi instrumentistes avec une approche technique exigeante. On joue par plaisir avant tout. L-A : Michèle a tout dit. Et comme dirait Pacific Sound 3003 on voudrait “rafraîchir notre paypal ” pour acheter le plus d’instruments possibles et tout faire à notre sauce. Pour ma part, il y a eu l’avant Rose Mercie, période où je me voyais comme quelqu’un qui ne savait pas faire de la musique du tout, à l’après, quelqu’un qui peut faire de la musique avec n’importe quoi.


Vous attachez un soin personnalisé à vos pochettes de disques. Elles sont chacune unique car peinte, tamponnée, numérotée à la main. Quelques mots sur ce choix esthétique ?

L-A : C’est une question à laquelle il faudrait répondre avec notre label Jelodanti. C’est eux qui sont à l’origine de l’idée des “pochettes uniques”. C’est leur marque de fabrique, ils font ça avec toutes leurs sorties. Il s’agit à la base d’un couple d’artistes mélomanes qui ont pris l'initiative de fonder un micro label pour se faire plaisir. Et leur plaisir c’est aussi d’intervenir manuellement sur chaque pochette. Nous on a de la chance dans le sens où nous avons eu le droit de participer aux tamponnages des pochettes, chacun s’y est mis. C’était un moment vraiment très privilégié, encore une autre forme de création qu’on a pu partager ensemble : la touche finale quoi. Pour "¿Kieres Agua?" on s’est vraiment fait plaisir c’est vrai. On a collaboré avec des personnes dont on admire vraiment le travail et ça n’a pas de prix : Romy Alizée pour la photographie, Félicité Landrivon pour le design et la typo, Clara Djian & Nicolas Leto aka Jelodanti pour les flammes à la main.


Justement dans la culture pop rock, qu’elles sont vos disques, pochettes et artistes préférés ? M : Celles qui me viennent à l’esprit c’est The Madclap Laughs de Syd Barrett, All Things Must Pass de George Harrison ou Brigitte Fontaine est… mais je n’ai pas en soit de pochettes d’album préférée. J’ai commencé à acheter des vinyls il y a même pas quelques années, avant ça n’existait pas pour moi. Donc le côté fétichiste keblo name dropping sur la pop rock culture ou mes goûts, ce n’est pas forcément mon truc. Sinon j’aime bien l’esthétique des années 60 ou 70 de façon générale. Les photos des groupes pris en contre plongée avec un champ ou la forêt et des fleurs et le ciel derrière et le nom écrit en grandes lettres. Et la pochette que j’ai fait pour mon album INERCIA avec un recto-verso absence présence. Ces derniers mois j’écoute souvent Broadcast. L-A : Et ben ce n’est pas pour faire du name dropping, mais moi la première pochette qui me vient à l’esprit c’est Mold Grows de Zad Kokar & Les Combi Beyaz. Zad il fait toutes ses pochettes sublimes lui-même. C’est d’ailleurs lui qui nous avait dessiné les fleurs qu’on a tamponnées sur la pochette de notre premier album. Récemment j’ai été soufflé en achetant De Mort Viva de Sourdure, la pochette réalisé par Camille Lavaud est incroyable et quand on ouvre le vinyle, ça fout carrément le vertige. Je ne peux pas trop te dire quels sont mes artistes préférés, car il y en a mille fois trop, mais mon premier “crush” de pochette qui remonte à l’adolescence c’est My War de Black Flag fait par Raymond Pettibon. Bon et ok j’avoue mon musicien préféré depuis ces 5 dernières années c’est Regis Turner. C : Moi j'adore les pochettes de Kate Bush. Même celles qui ont le plus mal vieilli. Pareil pour Bashung. Après, avec des graphismes plus chatoyants, j'aime aussi les pochettes de disque de chanteuses 60’s avec seulement quelques couleurs et quelques lignes. Pareil pour pas mal de groupes post-punk britanniques. Les dernières pochettes qui m'ont impressionné sont celles du groupe Woo, elles sont très choups. Une version psyché dissociée de certaines pochettes de Michael Hurley dont je suis bien fan aussi. Et sinon plus proches de nous, je suis bien évidemment fan du travail de Félicité Landrivon (Brigade Cynophile) et ultra fière qu'elle ait signé celle de notre dernier album, et aussi j'adore le travail de Marouchka Payen, graphiste et également super DJ.


Après que l’une d’entre vous était affalée sur un canapé (premier album), vous voilà en train de danser toutes nues autour d’un feu. Y a-t-il un lien entre ses deux visuels ? Quelle sera la prochaine étape ? M : Non aucun lien. Le visuel tient son origine d’une peinture faite par notre ami Patrick Lombe des Statonells. Il a peint une sorcière avec ses mains autour d’un grand feu. On avait souvent envie de l’utiliser. Après grande réflexion, on a eu envie de l’incarner en quelque sorte.

L-A : Ces deux images nous correspondent si bien ! Deux extrêmes qui nous ressemblent.


S’il y un message à faire passer à nos lecteurs, c’est ici !

I : Faites des groupes, des coopératives, ouvrez des lieux avec du matos de son et de vidéo en commun, des assos. Avec une majorité de femmes, de celles qui ont les yeux qui brillent quand elles parlent. Mettez ensuite tous vos savoirs et vos proches en relation et continuez à ne jamais vous arrêter.

C : Oui ! "Never stop witching "! Et surtout n'allez pas vous excuser de vouloir faire des choses à fond et de vous exprimer. Ce genre de truc a assez duré. Aussi, un truc hyper important : Vous pouvez carrément faire de la musique sans prendre de cours, sans savoir jouer ni chanter, faut juste trouver le genre d'instrument qui vous permet de vous exprimer et y aller à fond sans avoir peur que ce soit bancal ou un peu vide, c'est souvent là où c'est le mieux à vrai dire.

M : Venez nous voir en concert si vous avez l’occasion. Et si vous voulez nous faire jouer par chez vous contactez-nous ! Et si vous avez des résidences incroyables à nous proposer, on a hâte de tout savoir !

L-A : Merci on est Rose Mercie.



¿Kieres Agua? (Jelodanti Records/Celluloid Lunch Records) 2022






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