DISCOVER // SUITE EN SUN MAJEUR
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DE DORIAN GRAY AUX YACHINES EN PASSANT PAR OHIO OU SES DISQUES EN SOLITAIRE, OLIVIER ALBERT BRION DÉMONTRE DEPUIS PLUSIEURS DÉCENNIES QU’IL EST L’UN DES GRANDS SONGWRITERS DE CE PAYS. SON PROJET DISCOVER - ENTAMÉ EN 2002 – SE VOIT ENFIN RÉACTIVÉ APRÈS UNE PAUSE DE 20 ANS. CALIFORNIA SUITE, BRISE DE FRAICHEUR ENREGISTRÉE AVEC LE RENFORT DE LA GRACILE ET BILINGUE CHANTEUSE NOVA CANE, ENCHANTE LE CŒUR ET L'ÂME DE SES CHANSONS SOLAIRES ET DÉLICATES. BRIAN WILSON S’EN EST ALLÉ MAIS LA DOUCE ILLUSION D’UN ÉTÉ SANS FIN PERSISTE.
"C’est très bizarre parce que Brian Wilson est mort le jour de la sortie du nouvel album. C’était un peu une espèce de grand frère spirituel. Il fait partie des gens qui m’ont amené à faire de la musique – c’est une figure tutélaire. C’est un peu étrange parce que je le prends assez positivement – c’est un peu comme un passage de relais. Je vais continuer à modestement apporter ma pierre à l’édifice. Cette Californie un peu magique, cette Californie rêvée, c’est un peu l’Utopie de Thomas More. Je sais qu’elle n’existe plus – ou peut-être même qu’elle n‘a jamais existé - mais je pense que la vie, ce sont des arrangements. On se créé tous des refuges imaginaires et pour moi, la Californie c’est un peu ça, en fait. C’est comme un puzzle – je prends ce qui me plait et j’assemble. C’est un peu comme la musique. C’est un kaléidoscope. On prend à droite, à gauche et après on crée des chansons et de la musique avec tout ce que l’on a emmagasiné depuis des années. Mes influences ont toujours été très américaines – à part les Beatles bien évidemment qui pour moi sont l’Alpha et l’Oméga. Je préfère les groupes américains – je trouve que ça chante très bien en général, les harmonies vocales et tout ça. Je ne sais pas si c’est dû à l’accent mais ils ont un timbre de voix très différent. Et puis j’aime le soleil, le look Californien, la côte ouest américaine. Pourtant j’ai passé du temps à New York, j’y ai joué et j’ai adoré. C’était un rêve de môme et c’était incroyable de jouer dans des clubs du Village. L’accueil était vraiment chouette. C’était une belle expérience – c’était avec Ohio il y a 15 ans. Depuis, je n’avais rien sorti – à part Potomac mais c’était uniquement en digital."
California Suite est donc le troisième album de Discover après High Life en 2002 puis California Songs deux ans plus tard. Il s’agit en fait de la version revisitée de Back To California, un disque auto-édité en petite quantité vendu littéralement sous le manteau lors des quelques concerts que Discover a donné l’hiver dernier et dont la finesse de la production nous avait déjà beaucoup impressionné.
"J’étais au Cap-Ferret en vacances avec ma compagne et je repensais à la couverture du magazine Magic que j’avais fait il y a vingt ans avec Discover à l’époque de California Songs. Je me disais que ce serait pas mal de refaire un truc. J’avais des chansons et on a décidé d’y aller – ça s’est donc fait comme ça sans trop réfléchir. On a enregistré et édité un petit CD de présentation et mis également les chansons sur Spotify. C’était une sorte de carte de visite. Il y avait 8 titres et on était content de ce qu’on avait fait. On a commencé à avoir pas mal d’écoutes et Sergio Taronna du label Hot Puma nous a finalement signés en novembre dernier. Il nous a proposé d’agrémenter le disque de nouveaux morceaux. J’en ai donc retravaillé certains comme Back To California et Let Me Take You Down – qui ne sont plus dans la même tonalité qu’à l’origine - et en ai ajouté d’autres. On devait le sortir en février mais je suis assez lent et j’aime bien prendre mon temps. Sergio a enregistré quelques parties de batterie sur Number On My Wall et My Vintage Car et je les ai mélangées avec des samples. Tout cela donne un peu plus de consistance. J’écoute pas mal de musique et il y a beaucoup de jeunes groupes aujourd’hui aux Etats-Unis qui sonnent un peu comme ce qui se faisait dans les années 90 au niveau des guitares, mais revisité. Je trouve qu’il y a plein de trucs bien et ça m’a donné envie de refaire un peu pareil et de mettre des guitares comme on le faisait à l’époque de Dorian Gray. J’ai racheté une Jazzmaster, j’ai densifié un peu le côté rythmique et ajouté quelques synthés."
Ce qui frappe à la première écoute de California Suite – outre l’indéniable qualité des chansons – c’est encore une fois cette production d’une absolue légèreté. California Suite fait l’effet d’une bulle de savon flottant dans la belle lumière d’un soir d’été. Tout y est doux et subtilement mordoré. Le disque est mixé et masterisé relativement bas et il faut parfois tendre l’oreille pour entendre certains détails. Le travail sur les voix notamment est un ravissement.

"Ça me fait très plaisir parce que c’est exactement la façon dont je vois les choses – et cette légèreté vient effectivement surtout du travail sur les voix. Celle de Nova est assez douce et sucrée et je trouve que ça se marie bien avec les chansons. Le fait d’avoir ajouté un peu plus de densité rythmique par rapport à la première version donne un ensemble cohérent et qui fonctionne bien. Tout est en effet mixé très bas et c’était voulu. Ce sera différent pour le prochain mais c’est ce que je souhaitais pour celui-ci. On a eu récemment une chronique sur un webzine Américain dans lequel l’auteur explique qu’il convient d’écouter le disque au casque car cela donne une autre dimension à l’album. J’ai pour ma part récemment réécouté Pet Sounds au casque dimanche matin en buvant mon café et c’est vrai que ça n’a rien à voir. On redécouvre des trucs qu’on n’entend pas forcément et je trouve ça génial. J’ai donc mixé le disque un peu dans cet esprit-là parce que j’aime écouter la musique au casque."
California Suite est un disque concis et seule Home So Far excède 3 minutes – 3 minutes et 4 secondes pour être tout à fait précis.
"Pareil – c’est voulu. On peut tout dire en 3 minutes. La concision est vraiment la base de la musique pop pour moi. On va à l’essentiel – ou alors c’est autre chose comme Pink Floyd ou The Cure mais ce n’est pas ce que j’ai envie de faire."
Si Olivier Albert Brion est – on l’aura compris – un amoureux de la Californie des 60’s et des 70’s – fantasmée ou réelle - la ravissante reprise du Love Less de New Order rappelle qu’il a également grandi les oreilles tournées vers Albion.
"En fait, lorsque j’étais jeune j’habitais à Charleville-Mézières. Ce n’est pas l’Angleterre mais il pleut, il fait froid, c’est gris – enfin surtout l’hiver. J’écoutais Bernard Lenoir et c’est vrai que j’aimais bien tous ces trucs de Manchester, New Order, The Smiths puis The Stone Roses, Factory records, La Haçienda. New Order avaient ce côté un peu dark au début mais ce que je trouve génial c’est qu’ils se sont totalement métamorphosés durant leur séjour à New York au début des 80’s - ils découvrent la dance music, ils se mettent à porter des shorts et des polos Lacoste. J’adore Technique. Il est d’ailleurs sorti l’année où j’ai publié mon premier single avec Dorian Gray. Ça tourne souvent autour des mêmes accords, New Order, mais Barney trouve toujours des mélodies incroyables. Cette version de Love Less est acoustique. On en a fait une autre plus rapide et rythmée que je mettrai sur un autre projet plus tard. Pour moi, c’est leur plus belle chanson. J’aime bien le texte. J’aime bien faire des covers mais il ne s’agit pas de faire des photocopies. Sur notre version, j’ai un peu changé les accords sur le pont, il y a le travail sur les voix. Voilà – c’est un petit hommage."
Arrangements, songwriting, production, artwork - California Suite est une véritable réussite truffée de petites merveilles saupoudrées de papapapas et délicatement ourlées de mélancolie - à l’instar des deux singles Lonesome In The Sun et My Vintage Car parus en éclaireur. Espérons que nous n’aurons pas à attendre vingt années supplémentaires pour découvrir la suite.
"Je suis un peu hyper actif depuis quelque temps – j’ai plein d’idées de morceaux. Je ne sais pas pourquoi. Ça va, ça vient donc Discover va continuer. On commence à avoir pas mal de retours positifs. La ville où l’on est le plus écoutés c’est Los Angeles, ensuite c’est Austin puis Tokyo ! J’ai tellement travaillé sur ce disque que j’ai eu du mal à le réécouter. Pour l’anecdote, je suis allé revoir le film Love and Mercy l’autre soir et en rentrant, sur mon vélo, j’ai réécouté California Suite au casque et en fait j’étais content. Je me suis dit que même si personne ne l’écoute, c’est exactement ce que j’ai voulu faire – et c’est très satisfaisant."
To be played (Disc)over and over again !
Mathieu David Blackbird

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