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DAHLIA_SONGS

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    PERSONA
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Dernière mise à jour : il y a 21 heures


© Ed Oeillet
© Ed Oeillet

QUE LA MONTAGNE EST BELLE !



NOUVELLE ETAPE IMPORTANTE DANS LE PARCOURS ONDOYANT DE LA MUSICIENNE BORDELAISE, THE MOUNTAIN GARDE LES YEUX RIVÉS AU CIEL ET RESSEMBLE À UNE BELLE LEÇON DE VIE.


Le gracieux sujet de cet article a beau avoir un Curriculum Vitae long comme le bras et publié de nombreux disques sous le nom de Fleur Offwood, je n’appris son existence qu’en novembre 2023 grâce à l’élégant et toujours perspicace Olivier Popincourt – bien connu des lecteurs de cette revue – qui m’en vanta un jour le travail en évoquant notamment Carole King. Il n’en fallait pas plus pour que je me précipite un soir d’hiver de 2024 au fin fond du quinzième arrondissement à l’occasion d’un concert en appartement qu’elle donnait sous le nom de Dahlia_songs avec son ami et fidèle collaborateur Boris Maurussane – que l’on retrouve tout naturellement sur The Mountain – pour une prestation qui me mit KO debout. S’ensuivit une année à espérer un disque mais qui ne vit la parution que d’un single en digital – l’acoustique et revigorant Saint Rita – jusqu’à ce lundi de Pâques – date au combien signifiante pour la chrétienne qu’elle est.


Si certaines chansons parues sous le nom de Fleur Offwood valent évidemment le détour – on pense notamment au délicieux Ma Puce en collaboration avec le grand Christophe Chassol sur l’album Les Chansons Naïves paru il y a 3 ans - The Mountain est d’une autre envergure. C’est pour tout dire un absolu ravissement qui – outre la susnommée Carole King – convoque avec bonheur les fantômes de Burt Bacharach, Astrud Gilberto, Laura Nyro ou encore The Carpenters. Un disque poignant et douloureux dans lequel il est question de perte et d'épreuves - mais également d'amour et de lumière.


" Les seules amours que j’évoque dans ce disque sont celles que je porte à mon fils, au Christ - I Keep Smiling est une sorte de gospel, comme Ex Voto - à ma famille et à mes chats - The Mountain, When I go too far away, Simple Moments, Bianca. Je voulais que cet album puisse partager la pureté des sentiments qui ont peuplé mon cœur ces dernières années. Le décès brutal de ma sœur et la maladie qui a emporté le père de mon fils auraient pu me rétamer moralement si je n’avais pas eu la foi. D’ailleurs, la montagne est un symbole de rapprochement vers le ciel, et on n’en atteint pas le sommet sans faire quelques efforts. C’est aussi le décor savoyard de souvenirs de vacances avec feue ma sœur, chez nos grands-parents, lorsque j’avais quatre ans et elle seize. Je ne la voyais que l’été et à Noël et j’essayais d’en profiter au maximum. L’amour au sens large, filial aussi, s’est déployé en quittant Paris pour Bordeaux, car suite à la mort de ma sœur, ma mère - 85 ans maintenant - s’est retrouvée seule en proie au chagrin, j’ai craint vraiment qu’elle ne passe pas l’hiver. Mon fils et moi avons tout recommencé et même si cela n’a pas toujours été facile, nous ne regrettons rien. Aujourd’hui il a plein de copains, et on fait pousser des légumes dans notre petit jardin. The Mountain est la soundtrack de cette période de joie et de foi farouchement conservées malgré tout."


Il serait tentant de considérer ce disque comme une sorte de thérapie mais il n’en est rien.

" Non réfute-t-elle. Je rends grâce, je rends hommage, je propose une évasion mais c’est tout."


On ne sera ainsi guère étonné que certaines chansons – comme le déchirant Ex-Voto par exemple – évoquent par moment la musique liturgique – à l’instar de certains passages du Smile des Beach Boys. La place du sacré dans la vie de Dahlia_songs est centrale.


" Dans le socioculturel, j'ai travaillé avec des personnes de tous horizons : enfants du voyage, personnes sans domicile fixe, en psychiatrie, enfants et ados de quartiers sensibles, placés par l’ASE, migrants, mineurs isolés, enfants, ado et adultes en situations de handicap, physique comme intellectuel, enfants autistes, plus récemment déficients visuels… Au bout de vingt ans je me suis aperçue que le message du Christ faisait sens avec tout ce que j’avais pu observer, appréhender et recevoir de partages et de miracles, surtout en musicothérapie et danse thérapie, quand je voyais des enfants paralysés qui bougeaient une main ou un pied au son de la musique. Mon retour à la foi est maintenant bien inscrit dans mon quotidien, avec un chapelet par soir et les sacrements chaque semaine - adoration, confession et eucharistie - mais je me garde bien de toute bigoterie ou prosélytisme. J'ai plutôt une approche amoureuse et j'y consacre une grande partie de mon art, pratiquement toutes les chansons de mon album évoquent la présence de Dieu. Des stars comme Daniel Darc, Marie Laforêt, Gad Elmaleh ou Bob Dylan ont été touchés par le message du Christ et j’aime bien ce qu'ils en ont fait. J’aime l’idée que chanter de belles choses puisse émouvoir par-delà les convictions de chacun. Un titre comme Saint Rita, qui a précédé l’album, sorti chez Motel Records et en synchro chez Gum, a été très adopté en l’occurrence par des personnes athées. Ça aussi ça tient du miracle ! "


The Mountain est donc le premier album publié – pour le moment uniquement en digital mais nous croisons nos petits doigts – sous l’alias Dahlia_songs.


" L'été 2022, quand j'ai déménagé en province, j'ai pensé vraiment arrêter la musique, de façon personnelle du moins. J'aurais bien continué à composer pour les autres en ce qui me concernait mais mes chansons pop électro en français qui passent sur FIP à 3h du matin... je ne trouvais plus l'énergie de les chanter. J'avais finalisé un titre un peu plus rap dans la même continuité, en collab avec Vito Bendinelli - SCH, Aya Nakamura - mais je n’ai pas réussi à me motiver à écrire tout un e.p. dans cet esprit, en français. Un soir au piano j'ai écrit une chanson pour ma sœur, en anglais parce que ça sonnait mieux, c'est sorti comme ça. Il y en a eu plusieurs. Je me suis finalement lancée dans ce projet qui avait l'envergure qui me manquait, des chansons écrites avec des larmes, des miracles et du soleil. Le dahlia est une fleur que je voyais tous les jours en partant au boulot, et qui symbolise le courage dans les épreuves - donc le nom est venu d'emblée. Sur Spotify il y avait des Dahlia partout donc j'ai dû y ajouter quelque chose de reconnaissable : Dahlia_songs - et depuis je me présente comme ça."


©Angelo D
©Angelo D

" Les premiers mélomanes que j'ai rencontrés étaient mes parents. Ma mère avait fait pas mal de concours de piano dans son enfance et mon père collectionnait les disques : Pink Floyd, Gershwin, Gainsbourg, les Chœurs de l'Armée Rouge, Louis Armstrong, Les Beatles, William Sheller, Brel, Ennio Morricone... Ils faisaient des blind tests sur Radio Classique dans la voiture et ils étaient très bons je dois dire. Quand j'ai eu sept ans ils m'ont offert une petite harpe d'étude sauf je n'ai jamais rien compris au solfège, je dois être dyssolfégique - si ce mot existe - et je ne m 'en sors qu'à l'oreille mais ma mère n'a pas lâché le morceau et comme j'improvisais sur son piano, j'ai continué à onze ans avec la découverte d'une méthode assez moderne de tablatures pour clavier qui m'a permis de jouer et chanter du Goldman, du Elton John... Ça épatait mes cousines.


A quinze ans, je me suis offert une guitare avec mon argent de poche. A l'oreille et avec des livrets que je trouvais à la Fnac de Bordeaux, j'essayais de jouer du Laurent Voulzy et du Kurt Cobain, et puis comme ce n'était pas simple à la maison car j'aidais beaucoup mon père en situation de handicap, je me suis retrouvée en foyer à 16 ans avec une cinquantaine filles qui voulaient absolument chanter Aznavour, Dalida, Balavoine, donc je me suis fait des amies tout en progressant. A 17 ans, je commence à composer quelques titres, des bossas novas en français surtout, mais flanquée d'un gros syndrome de l'imposteur. Je vais à la fac et je bosse à côté donc à mes yeux la musique n'est qu'une occupation, un hobby. Je pars un an à Brighton et toujours étudiante, je bosse dans un restau jamaïcain tenu par un fan de Capleton. Je découvre plein de musique là-bas, des festivals où jouent Les Chemical Brothers, James Brown... Puis retour en France et entre 2003 et 2007 je me consacre à la compo au piano, accordéon et arrangements d'une quarantaine de titres pour un projet quelque part entre Arthur H et Brel nommé Les Loups de Pavlov, duquel je suis encore nostalgique. Parallèlement je joue dans un groupe de reprises tziganes. En 2008, période garage, j'écris, compose et chante quelques titres de folk sous le nom de Fleur Offwood mais aussi de l'électro car j'ai découvert les logiciels de MAO sur lesquels je peux passer des nuits entières. Je joue dans le métro aussi, comme beaucoup de musiciens à l'époque. Quelques albums de pop mais aussi d'électro plus tard, je suis repérée par des éditeurs, Warner/Chappell Music Germany qui placent des titres un peu partout. Ça tombe bien car je suis maman solo et je dois laisser tomber les concerts et les plans sonorisation - une autre de mes casquettes, avec un diplôme d'installateur électronicien en systèmes audio professionnels et quelques piges à Beaubourg et en festivals. Je me lance alors dans la composition sur mesure depuis mon petit home studio, tout en continuant mes ateliers en animation socioculturelle.


En 2010 j'ai un groupe constitué de candidatures spontanées de musiciens très talentueux. Mes collègues ne vivent pas avec un enfant dans les bras et donc dans une démarche inévitable de Douanier Rousseau. Ils croient en moi mais veulent tourner, donc on se sépare et deux d'entre eux partent avec Miossec. Entre 2013 et 2016 je vogue entre la Manufacture Chanson qui me donne un nouveau souffle salutaire, et quelques projets éphémères pour me relancer sur un chemin solo et parfois accompagné. Je pense que j'en suis à mon dixième album, si on compte ceux qui sont tombés dans l'oubli ou gravés à la sauvette, en tout cas j'ai plus de 120 titres à mon nom à la Sacem, où je suis depuis 2009. Mon dernier album au nom de Fleur Offwood est sorti en janvier 2022, avec de magnifiques invités comme Chassol, Jo Wedin, Maud Octallinn, The Rodeo, Nina Savary, Astrobal… J'ai aussi joué pendant trois ans des synthés pour un groupe de dream pop - Levitation Free - et ce fut une expérience rafraîchissante jusqu'au déménagement du leader en Bretagne - il va d’ailleurs bientôt sortir un album. Je compose aussi pour des documentaires ou court-métrages, notamment ceux de mon amie Manon Heugel.


J'écoute tellement de styles que ce serait beaucoup trop long à énumérer. Merci d'avoir repéré ma fanitude des Carpenters et de Burt Bacharach... Ces compos sont d'une tendresse et d'une intelligence…pour moi c'est l'enfance, je suis née en 78 et on écoutait ça partout, même quand on allait manger au Flunch, cette époque où ma mère avait un brushing et mon père fumait au volant avec sa coupe de Tom Jobim époque Elis Regina. Tiens ! J'en profite pour te confier que Caetano Veloso et Astrud Gilberto ont fortement influencé mon Simple Moments : de la bossa saudade dont le chant se prolonge et se mêle à la flûte. Aujourd'hui heureusement il y a les Lemon Twigs, Mocky ou Daneshevskaya pour honorer cette pop riche et enveloppante. J'ai découvert James Taylor avant Carole King, et je ne connais pas Laura Nyro.


Il y a beaucoup de voyages dans cet album : Sacred Heart est comme son nom l'indique une prière au Sacré Cœur, que j'ai composée un 5 octobre, jour de Sainte Fleur, juste avant d'apprendre le décès du père de mon fils. Je faisais la vaisselle et puis j'ai entendu un mélange de Sway de Dean Martin et de supplique mexicaine. Charbel, c'était important aussi car il s'agit d'un saint thaumaturge que j'ai énormément prié et qui a guéri des milliers de gens depuis sa dernière demeure au Liban. Cela faisait un moment que, toujours dans un esprit sixties, je pensais à un chant oriental pour le célébrer. Et puis j'aime quand un album ne se limite pas qu'à un seul style musical, c'est la démarche globale qui relie les titres entre eux. Mettre le même style à toutes les chansons d'un album c'est comme faire porter un uniforme aux enfants d'une même classe. "


A l’écoute de The Mountain, on rêverait de voir un jour Dahlia_songs produite par Louis Philippe – on se souvient ainsi d’Initial, le joyau qu’il avait réalisé pour Laïla Amezian en 1997 – ou par Bertrand Burgalat – Dream Of A Country n’aurait pas dépareillé sur Les Choses Qu’on Ne Peut Dire A Personne publié par le patron du label Tricatel en 2017. L’approche artisanale du disque ajoute cependant à l’émotion ressentie – ces glissandi sur le manche de la guitare ou ce micro que l’on frôle accidentellement. Nombre d’amis ont prêté main forte – et notamment le très doué Boris Maurussane que nous mentionnions plus haut.


" Boris Maurussane, sa femme photographe Edith - dite Ed Œillet - et leurs enfants font partie de mes amis-famille. J’ai rarement rencontré une telle connivence artistique et humaine. Boris, qui va bientôt sortir un second album magnifique, m’a proposé de rejouer toutes les basses que j’avais initialement composées en midi, mais aussi de chanter des chœurs - Sacred Heart - et ce fut une vraie bénédiction, comme pour l’extraordinaire Lee Skelly que j’avais initialement contacté avec des démos pour un partenariat car son label Dime Records rend vraiment hommage à la musique des années 70. Lee m’avait répondu ‘pas de sous, mais j’adore tes songs et je te propose de jouer gracieusement toutes les batteries’. Une générosité renversante. Parmi les choristes, des amis de Bordeaux, très brillants et chers à mon cœur : Lola Benoist - OhMyBaroness - Constance Petrelli - Une Femme Mariée - Julie Thullier - Ama Waves - et Guillaume Fédou. Les sessions d’enregistrements se sont déroulées chez moi entre dévouement sérieux et nombreuses rigolades. Arno Berthelin est aussi venu poser une flûte : on s’était rencontrés lors d’un co-plateau avec le groupe de reggae Massa où il officie, le concert avait été organisé par Milos Asian et Arno avait génialement improvisé sur une de mes bossa novas, encore des gens sympas. Boris et Lee m’ont envoyé les stems des basses et drums depuis respectivement Paris et la Provence, et j’ai enregistré les pianos à queue à l’Impromptu Théâtre à Bordeaux grâce à Pascal Pistonne. Vianney de l’Inconnue à Talence m’a très gentiment laissé un week-end pour y enregistrer mes voix. Sans parler de Nicolas Séguy, songwriter, producteur, pianiste de Kery James et Grand Corps Malade… qui m’a tout simplement offert le mastering. Nul doute que cet album devait se faire, j’ai été archi gâtée."


The Mountain s’affirme déjà comme le compagnon fidèle de nos errances dans les hauts quartiers de peine   - nul doute qu’il le sera toujours lorsque le soleil reviendra.

" Si Dieu le veut il y aura une sortie CD bientôt." espère Dahlia_songs.


Un label avec une paire d’oreilles en parfait état de marche serait déjà un bon début.



Propos recueillis par Mathieu David Blackbird 



Dahlia_songs   The Mountain  (Autoproduction – 2025)
Dahlia_songs   The Mountain  (Autoproduction – 2025)




 
 
 

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