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THE REED CONSERVATION SOCIETY


©PHILIPPE DUFOUR

HISTOIRES D’EAU


APRÉS TROIS E.P.S ET UN SINGLE REMARQUABLES – ET REMARQUÉS PAR LES AMATEURS DE SONGWRITING A L’ANCIENNE ET DE MUSIQUE POP BOISÉE - LA FORMATION FRANCILIENNE REVIENT AVEC UN PREMIER ALBUM PUBLIÉ SUR LA STRUCTURE FRANCO-BRITANNIQUE VIOLETTE RECORDS. INTÉGRALEMENT INTERPRÉTÉ EN FRANÇAIS – CE QUI N’ÉTAIT JUSQU’A MAINTENANT PAS LE GENRE DE LA MAISON – LA SOCIETE DE PRÉSERVATION DU ROSEAU RESSEMBLE FORT A UN PARI RÉUSSI.


The Reed Conservation Society sont des artisans comme on en fait plus ou peu. On subodore d’ailleurs que leur patronyme – outre le clin d’œil appuyé aux Kinks - est une manière de profession de foi. Ces gens savent prendre leur temps, distillant disques et apparitions publiques avec parcimonie et polissant leur grand œuvre avec passion loin de toute ambition commerciale : leur premier long-jeu déploie ainsi lentement ses charmes et ses langueurs à mesure qu’il infuse.

"Ah oui clairement ! Des artisans, c’est exactement ce que nous sommes confirme Stéphane Auzenet, chanteur, multi-instrumentiste et compositeur de cette petite troupe à géométrie variable.

L’ordre logique c’est : Songwriting / Enregistrement / Disque / Concerts. Une boucle vertueuse, une manière à l’ancienne de faire de la musique."

Stéphane Auzenet n’en est pas à son coup d’essai avec The Reed Conservation Society. On l’aura notamment croisé au sein de Verone – ainsi que sous l’alias Cascabel le temps d’un single au galbe plus électronique - mais certains archéologues s’accordent à situer ses premiers pas musicaux au début des années 1990.

"J'ai joué dans un groupe pop, très influencé par Sarah records et la twee pop. Le groupe s'appelait The Pillows, et on jouait avec d'autres groupes à Paris qui faisaient aussi de la pop - Meek, Superdrug, Je jouais de la basse et je chantais. Pas de disques publiés mais on est sur des K7 compilation. Ça se faisait beaucoup à l’époque.

Mon parcours est celui d'un autodidacte, apprentissage de la guitare folk vers 12 ans et ensuite j'ai toujours composé et joué dans différents groupes. A cette époque, dans mon entourage tout le monde jouait d'un instrument... notre occupation principale c'était de jouer ensemble.

Pour Mathieu Blanc c'est un parcours plus prestigieux. Il est professeur en conservatoire. Je suis incapable d'écrire des partitions pour un quatuor à cordes, contrairement à lui."

La Société De Préservation Du Roseau est un disque gorgé d’eau dans lequel la nature et les éléments tiennent une place centrale, mêlant teintes pastel ou doucement mélancoliques et textes charbonneux. Un disque doux amer.

"Oui - je suis d'accord avec ce terme. Pour les textes je voulais des histoires d'amour compliquées, des relations toxiques et à propos de la nature qui nous parle et que l’on n’entend pas."

Ce qui nous amène tout naturellement à Molly, qui n’est nullement un hommage à la maman de Nick Drake – un musicien que Stéphane Auzenet affectionne pourtant.

"Ça aurait pu, mais non… cette chanson, je l’ai écrite en voulant faire une murder ballad à la française. Dans le texte, il y a tous les clichés du genre, une histoire d’amour déçue, la mort, le romantisme. J’ai relu Jean Giono, c’est pour moi une très grande influence, et le roman Le Chant du Monde, qui est baigné d’amour, de nature et de vengeance, a tous les ingrédients de la murder ballad.

Joe Dassin avait réussi son coup avec le titre Marie jeanne, qui était une reprise mais qui marche bien en Français. J'ai également adoré L'homme qui savait la langue des serpents de Andrus Kivirähk et Richard Powers me fascine beaucoup. Je pense que j'ai beaucoup puisé dans la littérature pour écrire les textes de mes chansons.

Concernant la musique, je voulais un format pop qui puisse se fredonner."

C’est le cas– à tel point que certaines des chansons présentes sur ce disque prennent un malin plaisir à s’incruster durablement dans un coin de notre cerveau pour ne plus le quitter.

Il en va notamment ainsi d’A Cœur Joie et de Laïka, superbes entrées en matière qui laissent augurer du meilleur pour la suite– la bossa nova languide d’Aux Rochers Rouges, les arrangements de cordes délicats de La Nage Indienne et Le Mont De Piété ou la virgule d’orgue de Petit Coefficient qui évoquera certainement aux nostalgiques de Felt le grand Martin Duffy.


©PHILIPPE DUFOUR

C’est donc la grande affaire de ce premier long-jeu : The Reed Conservation Society s’y expriment en français – avec des mots bleu foncé qui flirtent avec le noir. Depuis Gamine et Chelsea jusqu’à Holden, Orwell ou les newcomers de Planterose, nul n’ignore que langue française et musique pop cousue main peuvent tout à fait à l’occasion se marier à merveille.

Pascal Blua, co-fondateur du label Violette records et graphiste attitré, ne dit pas autre chose. "J’ai poussé Stéphane à chanter en français et je trouve qu’il a trouvé une identité qu’il n’avait pas avant – même si j’aime beaucoup les disques précédents. Je l’avais entendu chanter deux ou trois fois en français et je trouvais qu’il y avait quelque chose. Sortir l’album sur Violette est devenu une évidence pour nous et j’en suis très fier."

"En fait il y avait certains titres en Français que j'avais déjà maquettés il y a une dizaine d'années explique Stéphane. Je n'arrivais pas à les intégrer dans les Ep 1, 2 et 3 de The Reed Conservation Society.

J'avais une idée bien précise de la trilogie concernant la direction artistique et aucun titre en Français n'avait sa place.

J'écris régulièrement des textes en Français, mais tous n'ont pas vocation à devenir des chansons.

Le principal obstacle c'était de faire coïncider texte et musique. Le processus a été très long pour moi. Je pouvais être satisfait d'un texte mais il devenait insignifiant avec de la musique.

Cela a pris des mois pour que je puisse présenter une douzaine de titres. C'est beaucoup plus facile pour moi de composer en anglais, ma culture musicale vient de là. En revanche, en Français, on s'expose d'avantage, et la métrique de la langue est plus compliquée à agencer avec de la musique pop.

J'aime beaucoup Murat, Daho, Souchon, Higelin qui arrivent à faire sonner le Français dans un registre folk / pop.

Les textes de Florent Marchet me touchent, le premier disque de Biolay aussi.

J'ai beaucoup entendu de chansons en Français durant mon enfance. Ma mère est fan de Julien clerc et mon père de Ferrat."

Le défi était donc ardu mais se voit relevé haut la main. The Reed Conservation Society ajoutent une belle corde à leur arc sans que leur ADN et ce qui en fait la substantifique moëlle n’en soit pour autant modifié. Avouons simplement que nous n’aurions rien trouvé à redire si Pylônes - le single en Cinémascope paru en éclaireur - était resté à l’état instrumental, tant les arrangements panoramiques de cordes et de cuivres et ses guitares de western d’après l’apocalypse comblent d’aise et s’avèrent particulièrement éloquents en l’état, semblables à une mini-tornade survenant en milieu de parcours.

Un parcours comme un rêve agité, mâtiné de couleurs étranges et strié de noirceur.


MATHIEU DAVID BLACKBIRD



La Société De Préservation Du Roseau (Violette records) 2024




violetterecords.com

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