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Jean-Marc QUINTANA

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    PERSONA
  • il y a 3 jours
  • 9 min de lecture
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Jean-Marc Quintana, l’Erudit Rock !


Tel un Nick Cohn hexagonal, Jean-Marc Quintana poursuit depuis 15 ans sa quête de réhabilitation des « Héros oubliés du rock’n roll » dans une indifférence (apathie) bien française. Un travail de haute volée dans un style qui rappelle les grandes années de Rock & Folk. Il est temps de redécouvrir ses livres et d’acquérir au plus vite le dernier : « Instantanés Confidentiels » – Rock & Pop – 1962-1969 »


Archéologue du rock, Jean-Marc Quintana vient de publier son 4eme livre depuis 2012. Loin de la masturbation intellectuelle de ceux qui se racontent via un album, un souvenir voire une carrière de fan, ce natif du 14e arrondissement de Paris, dont la famille a déménagé en Provence quand il était encore enfant, préfère fouiller les archives, fréquenter l’INA, recouper des témoignages afin de reconstruire des histoires qui, jusqu’à présent, n’intéressent personne.

Celles de rockeurs, rockeuses, chanteuses, groupes, punks... passés à la trappe de l’histoire. Il remplit les interstices manquants de la grande histoire en évitant un énième livre inutile sur les Beatles, les Stones ou les Sex Pistols. Le rock alternatif n’étant pas son trip, il préfère rester dans une période comprise entre 1962 et 1984, au mieux.



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J’ai rencontré Jean-Marc Quintana la première fois en 2013 par l’intermédiaire d’un ami. Il avait publié son premier livre un an auparavant et le quotidien La Provence lui avait consacré une pleine page. Il s’agissait de raconter les punks d’Orange et d’Avignon, une histoire locale, mais dont les premiers, en goguette à Londres, avaient terminé sur la pochette d’une des compil anglaises Punk & Disorderly. Sans compter que le final était un mec qui se faisait suriner à mort sur la place du Palais des Papes. Didier Fernandez (dont il est devenu un ami), avec sa tête de Johnny Rotten du Vaucluse, illustrait magnifiquement la couverture. Le livre s’appelle Décélération punk : Quand le rock’n’roll marchait dans la rue – Avignon 1977-1982. J’avais organisé une rencontre à la médiathèque où je travaillais, assortie d’une mini-expo constituée de goodies que des adhérents et moi-même avions sortis de nos collections. Ce fut l’occasion de créer des amitiés dont la première fut avec Jean-Marc.


Pour son second livre, en 2015, Le rock c’est ça ! Rock & Twist en Vaucluse (1961-1965) où il avait convié des rockeurs séniors à raconter leurs histoires, ponctuées là aussi d’archives puisées dans les soupirails (on doit écrire « soupiraux » mais c’est moins beau!) de la presse locale et des bibliothèques, entre Vince Taylor à Cavaillon (à La Cigale, un magnifique Music’Hall qui avait accueilli Joséphine Baker bien avant) ou Johnny à Avignon, j’avais monté un concert.

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En première partie jouaient de jeunes groupes rock du conservatoire de musique et ensuite Shadowgie, un quatuor de septuagénaires qui reprenaient avec talent (et parfois avec des instruments originaux rachetés au groupe) le répertoire des Shadows. Une occasion de faire se croiser les générations (même si j’appris plus tard que certains des vieux rockeurs avaient des accointances avec le fhaine local !!).

Deux ans plus tard, en 2017, Jean-Marc s’était de nouveau attelé à extirper les « Pépites oubliées du Punk Rock 1977-1978 » avec toujours ce style brillant d’écriture d’érudit es rock et après avoir contacté une myriade de personnes Outre-Manche, en Belgique, Hollande et France bien sur. Echanges de mails, appels téléphoniques, archives en tout genre, comme de vieilles collections de Rock & Folk, Best et toujours l’INA, l’Internet, en recoupant les infos, les orthographes et de foutus détails afin de livrer ces histoires au plus près du réel. Un must. Il en vendit encore moins !

Il faut dire que tout comme le premier c’est au Camion Blanc que fut édité le livre, sans aucune promo, ni distribution digne de ce nom et encore moins de travail éditorial. J’organisais cette fois une rencontre-petit-dej à mon étage de médiathèque consacré à la musique. Croissants et jus de fruit et seulement deux curieux ce samedi matin là ! Désespérant, mais un très bon moment. Jean-Marc étant un foutu bavard.

 

Il me disait alors ne pas renouveler ce genre de travail dans l’avenir ! Et entre temps nous nous croisions régulièrement lors de manifs à Avignon, lui avec son vélo, moi avec mon Nikon. Infirmier psychiatrique, Jean-Marc était aussi responsable syndical.

Depuis il ne travaille plus, mais l’écriture et les recherches ne l’ont pas quitté (ni la passion du vélo), puisqu’il vient de terminer ce 4 ème livre, en plus d’écrire régulièrement dans l’excellente revue Thésaurus de Claude Picard, l’homme qui compile et édite lui aussi des groupes (français) oubliés sur cette même période (1965-1985) sur son label Disques Caméléon (sans oublier son énorme base de données www.45vinylvidivici.ne. Un travail exemplaire. )


C’est d’ailleurs à ce propos, via un article sur un girl rock band suédois oublié, les Nursery Rhymes, qu’il m’avait appelé il y a trois ans afin de savoir si j’avais un contact à la médiathèque de Nice qui conservait les archives du quotidien Nice-Matin. Les Suédoises y étaient passées à l’occasion de deux tournées hexagonales en 1967 et 1968, avant que l’une d’elles, avec qui il était en contact, fit partie du groupe de musiciennes qui accompagna Michel Polnareff en 1971.

On retrouve ici ce papier remanié dans les 130 pages d’« Instantanés Confidentiels » avec sept autres parcours dont Goldie & The Gingerbreads (rien moins que le premier groupe rock féminin), She Trinity, Victoire Scott, Christel Ruby, Jean-Pierre Gadet, Chainsaw, Too Much et Bâtiment C. Soit six artistes ou groupes féminins sur les huit présents.

Ça fourmille de détails et c’est plus plaisant que les dix-huit tomes de Napoléon et la retraite de Russie (et c’est moins gore!).

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C’est à vélo, avec un maillot basque-euskadi, que Jean-Marc est venu en juillet dernier me livrer son dernier opus, tiré cette fois modestement à 100 ex (retirage possible) et qu’il distribue lui-même. Une bonne occase d’échanger avec cet infatigable parleur génial, qui conserve de nombreux contacts avec les protagonistes qu’il a interviewés depuis près de 15 ans.

 Devant un café,  il me précise « Le gars m’a dit qu’il avait joué sur la sono d’untel...mais j’ai appelé un ancien membre du groupe qui m’a dit qu’ils n’avaient jamais eu de sono !!! Il était un peu héroïnomane, alors je me méfie de ce qu’il raconte. Il faut sans cesse recouper les sources et les propos. » Preuve que c’est un travail de fourmis, tel un véritable Inspecteur Colombo du rock, un œuf dur ou pas dans la poche (il a possédé une Simca Aronde P60 durant 15 ans), Jean-Marc fouine et recolle les morceaux.


 

Interview - REC-ON !



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 Après avoir écrit ton 3e livre, les Pépites oubliées du Punk Rock 1977-1978, en 2017, tu avais dit ne plus en faire d’autre du fait du peu de ventes et d’intérêt suscité, qu’est ce qui t’a motivé à en écrire un autre ?

JMQ : Après une période de latence, Claude Picard (Cameleon Records) m’a demandé un article pour sa nouvelle revue Thesaurus. J’en ai écrit un, puis un autre pour le numéro 2, et, dans la foulée, un article supplémentaire pour l’ultime numéro du magazine du Club des années 60. Bref, j’étais reparti dans une démarche d’écriture.

 

J’imagine que ta collaboration à la revue de Claude Picard, Thésaurus, et cet article sur les Nursery Rhymes ont dû te redonner envie ?

Pour être tout à fait honnête, l’article sur les Nursery Rhymes a été l’élément déclencheur… mais par accident ! J’avais envoyé à Claude une première mouture, puis de corrections en corrections et après ajouts de nouveaux éléments, j’ai fini par l’inonder de multiples versions corrigées… Submergé par mes pièces jointes consécutives, il n’a finalement pas publié la version définitive… J’en étais un peu contrarié, il manquait une anecdote avec le Jimi Hendrix Experience et un compte rendu de la dernière date de la tournée des Nursery Rhymes de l’hiver 1967. Il y avait aussi quelques erreurs dans la mise en page : une légende photo erronée et des inserts de notes de bas de page qui avaient disparu. Je me disais qu’il me faudrait le republier dans son intégralité, sans trop savoir comment… Puis, le photographe, Jean-Louis Rancurel — qui m’avait offert l’utilisation de la photo des Nursery Rhymes parue dans le Rock & Folk d’avril 1967 — m’a envoyé des clichés des British Maid (un autre groupe de filles) au Golf Drouot. Il pensait que ça pouvait m’intéresser. À partir de là, c’était parti…

 

Depuis 2012 et ton premier livre, c’est un véritable travail d’historien que tu réalises.

C’est surtout de l’opiniâtreté… Je pars souvent avec très peu d’éléments, un article de journal ou une anecdote…


Tu as toujours été fan de travaux historiques ?

 J’ai un DEUG d’Histoire (qui professionnellement ne m’a rien apporté), ceci doit expliquer cela ?

 

Comment pratiques-tu quand tu commences un livre ?

Je commence par des recherches de documents ou de témoins susceptibles de m’apporter des éléments. Parfois, je n’ai rien et le travail d’écriture s’avère impossible. J’ai réduit les chapitres sur « Voix de garage » car je n’avais aucune information et aucun témoin éventuel sur certains groupes,  ça a été le cas avec les Drones de Manchester…

 

Tu gardes des contacts et des échanges réguliers avec les protagonistes-témoins que tu arrives à retrouver ?

Certaines des personnes restent en contact avec moi. Didier, le punk sur la couverture de « Décélération punk », est devenu un ami. J’échange des mails avec d’autres, on s’envoie des informations. Hélas, beaucoup sont décédés. Je suis allé à la cérémonie de crémation de Jean Échivard, il y avait moins de dix personnes, sa sœur voulait que sa dépouille parte sur les notes de « My Way » (version Sid Vicious, bien entendu), les responsables du crématorium ont été infoutus de la trouver, et à la place, il est parti avec « London Calling »… C’était pathétique, le résumé d’une vie pas ordinaire, loin des standards imposés.

 

De la même manière que Jean-Louis Rancurel (photographe important des années 60 et 70) et d’autres t’autorisent à utiliser leurs fonds, leurs archives

Quelques fois je tombe sur un os, à l’exemple de ce photographe local dont le père avait pris en photo toutes les vedettes des sixties venues se produire dans l’ancienne capitale du Comtat Venaissin. Il m’a tenu le bec dans l’eau durant plus d’un an pour une soi-disant photo de Vince Taylor. Au final et après négociations (y compris financières), j’ai pu obtenir l’utilisation d’un cliché inédit de Gene Vincent. Quant aux photographes Jean-Louis Rancurel et Gilles Bizé, ils m’ont tout simplement offert leurs photos et se sont même sentis honorés que je mette ainsi en valeur leur travail professionnel.


Je pense aux travaux d’anglo-saxon, comme Nick Cohn, mais en France peu se consacrent à ces « héros oubliés du rock’n’roll » ?

Ces « héros oubliés » sont au cœur de mon centre d’intérêt. Ce qui a pour conséquence d’ailleurs de réduire mon lectorat potentiel et complique la tâche pour trouver un éditeur… Mais je suis incapable d’écrire sur des artistes reconnus. Qu’aurais-je à apporter de plus à un lecteur lambda qu’il ne saurait déjà sur des artistes comme Johnny Hallyday, Kurt Cobain et d’autres ? Par contre, dans mes écrits, parfois la petite histoire rejoint le grande, comme avec les Nursery Rhymes qui annulent leur venue dans une arrière-salle d’une brasserie de Colombes et se voient remplacées au pied levé par un trio d’inconnus tout juste débarqués d’Orly, le matin même : Le Jimi Hendrix Experience ! Je raffole de ce genre d’anecdote.

 

Ton intérêt se porte sur une période allant des années 60’s au tout début des années 80, la suite ne t’intéresse pas ?

Les années 80 ont sonné le glas d’un certain rock. Bien sûr, j’ai continué à acheter des disques et à aller voir des concerts, mais on sentait bien que tout cela allait prendre fin. Pour caricaturer, on est quand même passé des Guilty Razors à Bandolero, c’est quand même parlant… Puis j’ai fait comme d’autres, j’ai redécouvert le rock garage US, la Motown, et je me suis focalisé sur des artistes à la notoriété nulle que je trouvais finalement essentiels…

 

Avant tout cela, tu avais fait quoi, un fanzine je crois ?

Avant les livres, j’avais créé un fanzine local, modeste et pas très bien écrit, et intitulé « Anonyme -Rock & Quotidien ». Auparavant j’avais chanté dans un groupe avec mon frère à la guitare et trois autres copains. On a fait quelques concerts, c’était l’occasion pour moi de ramper sur scène dans mon denim blanc immaculé en éructant les paroles de

I Wanna Be Your Dog !

 

Max Well


Livres

 

- Instantanés Confidentiels – Rock & Pop – 1962-1969 / Jean-Marc Quintana – Autoédition, 2025 - 130 p. - 12 € -

Disponible chez l’auteur, à Paris chez Born Bad, Librairie Parallèles, Gibert St Michel, à Marseille chez Lollipop Music Store, à Lyon chez Dangerhouse.

 

-  Voix de Garage - Pépites oubliées du Punk Rock 1977-1978  / Jean-Marc Quintana – Le Camion Blanc, 2017 -

 

- Le rock c’est ça ! Rock & Twist en Vaucluse (1961-1965) / Jean-Marc Quintana – Autoédition, 2015 – (Quelques exemplaires encore disponibles chez l’auteur)

 

- Décélération punk : Quand le rock’n’roll marchait dans la rue – Avignon 1977-1982 / Jean-Marc Quintana – Le Camion Blanc, 2012 -


Contact :jean-marc.quintana0320@orange.fr – 06 51 02 67 01

 

 

 

 She Trinity – I Fought The Law – 1966

 
 
 

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