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My Concubine // Comme elles s'en vont


©Jack Torrance


My Concubine revient avec un nouvel album Comme elles s'en vont, pour nous transmettre son plus savoureux opus avec un amour profond d'une chanson pop à la française. De la plus belle manière, Eric Falce, presque en solitaire, explore les différentes facettes physiques, sensuelles, symboliques du désir. Electron libre, il s'évertue de coucher toutes ses interrogations en chansons où il nous raconte ses histoires " vraies" de l'hibernation sentimentale, jusqu'à la quête d'une petite mort, toujours en cavale. Gonflement, essoufflement, d'un frisson insensé cet opus est un corps-à-corps vaillant qui forme et impose une vision facétieuse, autant qu'une prophétie amoureuse. Eric nous explique quelques rouages secrets.


Qu’est-ce qui a déterminé que c’était le moment de te lancer à nouveau ? Je ne souhaitais pas que trop de temps s'écoule entre l'album précédent Quelqu'un dans mon genre et le suivant. Des idées avaient germé . Des petites notes écrites par ci par là, quelques mots, des titres, des suites d 'accords enregistrées sur un portable. J'appelle ça « mes petits chantiers », je leur donne à chacun un titre qui bien souvent est le titre définitif de la chanson. Je les laisse de côté, ils mûrissent discrètement dans un coin de mon esprit qui fait sa petite cuisine. Et on m'appelle quand c'est prêt. Enfin, quand ça commence à mijoter... Quand j'ai suffisamment de « chantiers » je m'attarde sur chacun pour y mettre de l'ordre et surtout trouver le bon angle de la chanson. Le reste vient ensuite assez facilement. C'est une histoire d'assaisonnement, de dressage et mettre une jolie table. Parfois je me dis que j'aurais mieux fait d'ouvrir un restaurant...


Comment as tu travaillé sur ce projet musical en plein confinement ? Était-ce une motivation ?

Être enfermé plus de deux mois c'est une aubaine pour se concentrer sur son travail. Je ne remercierai jamais assez nos chers politiciens et experts émérites qui ont eu cette idée de génie. On arrête tout pour qu' Eric Falce puisse créer dans le calme et trouver l'inspiration... Mais soyons clairs, le confinement et son cortège d'absurdités ne m'ont inspiré qu'une légère irritation; pour rester poli...


Les textes qui composent Comme elles s'en vont sont écrits dans une sorte de questionnement plutôt personnel où tour à tour tu explores la vie, la séduction, le plaisir et la société. Cela souligne t-il le fait que ton album puisse être considéré comme solo ?

Tu as raison, j'explore tout cela. Nous sommes tous embarqués, disait Pascal. Et tous en solo. Surtout à la fin. Je me questionne et j'écris des chansons sur moi car je prends mon cas pour une généralité. On subi tous les mêmes affects notamment en amour. Après on les gère de manières différentes selon son vécu, son expérience, sa réflexion. Mais tous, nous nous posons des questions, parfois idiotes, parfois essentielles. Mon questionnement n'a donc rien de très personnel.


On remarque dans tes chansons qu'il y a un rapport très fort au féminin avec lucidité et perspicacité. La femme est-elle l'une de tes sources d'inspirations ?

Je suis fasciné par les femmes. Indépendamment des critères de beauté, elles incarnent la différence, le mystère, la complémentarité, l'autre point de vue qui tempère, comme un équilibre dans l'univers. Elles m'inspirent, dans la relation amoureuse, comme si elles révélaient une infime partie de l'amour dont on nous parlait au catéchisme. Elles me font sentir la perspective d'un amour plus fort que celui qui cache la simple volonté reproductrice de l'espèce. Comme si elles distillaient une partie infinitésimale de l'amour divin. Évidemment on peut être athée et se réjouir simplement de cet amour là. Il est déjà si fort et si rare qu' on le cherche partout...


Je subodore que tu évoques une certaine forme de peur de ne plus plaire, et de le voir dans le regard de l'autre ? Mais je me trompe peut-être ?

Oui tu te trompes ! Je n'ai peur de rien ! En tout cas pas de ne plus plaire. Au contraire, il faut savoir jouer et s'amuser de toutes ces situations. Celles où l'on plait et celles où l'on ne plait plus. Ces petites choses qu'il convient de prendre « comme elles s'en vont ». Ne jamais oublier que rien ne dure. Ne plus plaire comme plaire sont des états passagers. Essayons de rester un spectateur amusé et toujours curieux. Plaire, ne pas plaire, sont autant de ressentis intéressants qui font partie de l'expérience. Moi quand je ne plais plus ça m'attriste et ça m'amuse. Je suis attristé car j'ai de la compassion pour la personne qui me quitte et ne sait pas ce qu'elle perd, et amusé car cette situation m'offre des matériaux formidables pour écrire. A l'inverse, pour plaire je suis attristé de jouer le mâle tombeur, mais amusé de voir que ça marche. Mais là je n'en fais pas des chansons. Ce qui m'intéresse c'est quand ça casse, c'est là qu'on se pose les bonnes questions.

Évidemment moi je plaisante un peu, mon ego lui a moins d'humour. Il faut toujours le rappeler à l'ordre...


Dans ton titre Chevalier inexistant, tu chantes "sous l'armure il n'y a personne". Finalement, est-ce que la certitude du doute ne serait pas une sorte de mantra pour toi ?

Comme l'a dit le philosophe à grosses moustaches, ce n'est pas le doute qui rend fou mais la certitude... Les dogmes engendrent des idiots. Mais Chevalier inexistant est, modestement, une mise en chanson du roman d'Italo Calvino. Une chanson concernant les personnes qui projettent sur l'autre leurs désirs, leurs fantasmes. Des personnes qui ne voient en vous qu'une armure sur laquelle se reflètent leurs envies, mais cherchent elles vraiment à savoir qui il y a à l'intérieur ?


L'eschatologie c'est le cri jeté aux millions de prédicateurs de fin du monde (covid & co). Peux-tu nous expliquer le pourquoi du comment ? C'est une chanson à prendre au premier degré. Ici c'est moi le « prédicateur » car le monde sent de plus en plus mauvais. Si ce n'est la fin du monde on peut sentir la fin d'un monde... J'avais déjà ecrit une chanson intitulée Un parfum et j'avais en tête de faire une chanson sur la merde et la scathologie. Encore fallait-il que je trouve le bon angle et j'ai mis cela en relation avec l'eschatologie, l'étude des fin du monde.. .Cela m'a amusé. Je suis originaire du sud de l'italie où la schatologie fait partie des traditions. Il n'y a qu'à revoir les films de Fellini, Risi, Leone, Ferreri et d'autres. Evidemment cela ne plaît pas à tout le monde et certains programmateurs ou chroniqueurs n'ont pas manqué de jouer les saintes nitouches en rejetant l'album dans son intégralité. Les petits collets montés dont je parle dans la chanson. Ceux qui me reprochent ma schatologie sont souvent des gens qui cherchenrt la merde...

Retrouver Brigitte Fontaine justement sur ce titre, c'est forcément jouissif ? Raconte-nous comment est née l'idée de la faire chanter en duo avec toi ? Oui c'est très jouissif. Pour donner du mordant à la chanson je voulais une deuxième voix qui ne dise que « merde ». J'ai pensé à plusieurs personnes mais la seule qui pouvait à mes oreilles dire le mot de Cambronne avec classe conviction et crédibilité c'était Brigitte. Elle a d'ailleurs dit souvent merde à beaucoup de gens. Elle aurait pu me le dire également mais elle a accepté de participer à cette chanson qui l'a amusée. Je remercie au passage Areski qui a fait les prises de voix de Brigitte. On s'est tous bien marrés à faire cette petite chanson merdique qui parle de fin du monde.


Concernant l’aspect visuel, la photo de la pochette est comme suspendue dans le temps et tu sembles attendre l'inattendu, dans un cadrage à la façon d'une peinture d'Edward Hopper (subtil mélange de mystère et d'élégance). Peux-tu nous en dire plus ? Oui ! Il y a de cela ! Attendre l'inattendu. En tout cas quelque chose de possible qui peut arriver ou plus exactement quelque chose qui va s'en aller comme les sales moments que la vie nous réserve. C'est aussi vrai pour les bons moments qu'il faut savoir déguster. Prendre les choses comme elles s'en vont, d'où le titre de l'album et la chanson d'ouverture. Et puis cette pochette a un petit côté hors saison, un peu comme mes chansons . Mais les saisons reviennent encore avec ou sans changement climatique...


Enfin, globalement, qu’aimerais-tu que ceux qui écoutent ton album retiennent ? Qu'ils retiennent que MY Concubine c'est plutôt pas mal.


Stéphane Perraux



Comme elles s'en vont - Happy Home/L’Autre Distribution - 23/09/2022



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